Centre Hospitalier Universitaire Carémeau

  • Nîmes, France
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L’hospitalité méditerranéenne

 

Un hôpital est fait pour soigner. Efficacement. Dans l’urgence et la performance. Sans perdre les secondes qui peuvent coûter la vie. Dans une rationalité qui est celle de la fonction et du plus juste investissement.

 

Ce préalable explique pourquoi la fonction a dicté les localisations et les choix techniques. S’ils étaient contestés sur leur bien-fondé par le Maître d’Ouvrage, ils pourraient évoluer car l’architecture proposée n’est pas pour l’essentiel dépendante des localisations ou des proportions. Notre but est d’atteindre la proposition la plus satisfaisante aux vues des principaux critères de fonctionnement, quelles que soient les difficultés préalables pour y parvenir.

 

L’esthétique devient donc gestion de l’obligation.

 

Elle est aussi nature, essence d’une architecture-paysage de la Méditerranée. Un hôpital accueille. Des malades et des visiteurs. Dans un site puis dans un bâtiment.

 

Un site, dans le cas présent, c’est de la « caillasse », un relief, de la garrigue et l’appartenance à une communauté architecturale exigeante depuis des millénaires.

 

La première proposition est donc de créer un nouveau paysage s’appuyant sur le premier. C’est une tâche difficile car il faut créer de nombreux parkings à ciel ouvert…

  • Je propose de prolonger les murs de pierres sèches ou délitées qui existent en abondance sur le site, pour structurer les nouveaux parkings.
  • Je propose de planter dru devant les bâtiments voisins qui nous gênent, préférant l’écran végétal à l’écran « architectural ».
  • Je propose de valoriser et magnifier l’architecture existante par la création de murs-claustra, et l’implantation, en prolongeant l’effet de « mur de citadelle », horizontale, couleur brique dans le paysage.
  • Je propose de créer une grande terrasse (accessible aux malades et aux visiteurs), bordée de rochers, ponctuée de cactus et modulée par des grilles thématiques sur les patios nécessaires à l’éclairement des locaux médicaux.

 

La masse construite est située à l’endroit le plus fonctionnel au Sud en contrebas de l’hôpital existant. Elle est pour l’essentiel couleur brique comme la construction préexistante. Cette masse de briques est ancrée dans le sol, la roche et les caillasses. Elle intègre des matériaux et des thèmes essentiellement méditerranéens. L’architecture cherche le naturel et le confort climatique. Elle vise aussi au bien-être, au calme et veut démontrer que l’architecture hospitalière n’est pas vouée à des exercices uniquement financiers et fonctionnels.

 

Nous sommes à Nîmes. Dans le bassin méditerranéen. Les thèmes liés à l’accroche au sol, à l’architecture du nouveau site en termes de relief et de topographie, à la pénétration de la lumière par patios ou fenêtres protégées sont autant d’occasions d’ancrer le bâtiment dans sa région, dans sa ville. Les thèmes éternels du soleil et de l’eau, du végétal, de la garrigue, du figuier, de l’olivier, du blé … qui peuvent rejoindre ceux tout aussi symboliques du taureau, du Minotaure ou encore de la Louve Romaine ou encore du serpent, du palmier, du crocodile, etc., sont traités au travers de moyens simples, végétaux et minéraux, les plus explicites étant « des fers forgés ».

 

L’hôpital ainsi proposé est partie intégrante du paysage basé sur la fonction, sa forme peut évoluer sans changer profondément l’écriture et le sens d’une architecture organique qui a amarré, enveloppé, nuancé, différencié les contingences obligatoires d’un système précis. La précision est utilisée comme vocabulaire interne : sols lisses soudés couleur brique, chrome, peinture blanche, matériel choisi chromatiquement, etc., dans un contraste bien géré avec un extérieur plus expressif.

 

La dimension symbolique liée à l’essence du lieu confère à cette architecture une dimension humaine et optimiste, ainsi qu’une qualité plastique qu’il serait difficile d’atteindre dans un style plus conventionnel.

 

L’hôpital de Nîmes a l’hospitalité méditerranéenne. Il a l’ambition de faire partie intégrante du patrimoine architectural de la ville, de déjouer la fatalité de l’ennui architectural conditionné par le programme « hôpital », la facilité de la réponse stéréotypée : l’architecture peut réellement exister en milieu hospitalier. Gaudi et Scarpa, hommes de la Méditerranée, hommes d’exigence et d’architecture, l’auraient affirmé, plus fort que moi.

 

 

Jean Nouvel