The Landmark project – « Millenium »
- Beyrouth, Liban
Une architecture pour vivre Beyrouth
C’est une question d’urbanité, d’écho.
Pas de pastiche – reconduction du vocabulaire des époques précédentes.
Pas de clonage – reproduction du modèle informatisé des tours-bureaux de l’ouest.
C’est une question de juste ambition. Au milieu de témoignages historiques riches de l’époque romaine au début du XXᵉ siècle, comment inscrire positivement une attitude du début du XXIᵉ siècle ?
Le programme est riche. La densité forte. Nous devons créer l’un des épicentres de la ville.
Il n’y a pas d’exemple d’architectures importantes, qui franchissent les siècles, sans invention typologique. C’est la nature profonde du bâtiment qui est en cause. L’invention dans le sens de l’histoire. Sans nier hier, sans vouloir être demain. Traduire ici nos valeurs d’aujourd’hui.
Nous sommes à Beyrouth. Dans un climat exceptionnel. Il n’y a aucune raison d’avoir ici un bâtiment qui pourrait être à Montréal, à Berlin ou à Tokyo.
Il existe un héritage culturel, méditerranéen, phénicien. À réinterpréter. Dedans, dehors et dans l’entre deux, terrasses, loggias, atriums. Il existe la lumière. Le soleil éclatant et sa conséquence, l’ombre. Il existe des couleurs de la ville : réelle (la pierre dorée), symbolique (le pourpre). Il existe une végétation. Ce sont nos points de départ, notre matériau architectural. Nous voulons des commerces qui continuent la tradition des arcades, mais aussi celle du souk, sans perpétuer des conditions d’une autre époque. Nous voulons des bureaux agréables à vivre dans une lumière dosée, calmée par la végétation. Nous désirons un hôtel qui ait les qualités de confort des grands hôtels internationaux mais qui soit « un lieu », quelque part et non cet éternel standard qui ennui les grands voyageurs. Nous voulons créer le désir d’y venir, d’y rester, comme un lieu calme, confortable, hédoniste. Le fitness dominera Beyrouth, terrasse couverte unique, lieu de rencontre, de convivialité. Le restaurant est au juste endroit pour être en liaison directe avec les chambres, le hall, la vue, le fitness…
Chacun de ces programmes a une typologie singulière, attractive, parce que la valeur immobilière se crée d’abord par des lieux plus pertinents, plus séducteurs, plus agréables à vivre que d’autres. C’est vrai jusqu’aux grands condominiums qui sont de vraies maisons avec d’immenses terrasses sur les plus belles vues, terrasses plantées ombragées.
L’ensemble est un fragment de ville. Unique. Il fera partie après les autres jalons des siècles précédents de la carte visitée de Beyrouth.
Jean Nouvel