Musée d’art et d’histoire (MAH)

  • Genève, Suisse
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Du diagnostic à l’ordonnance

 

Le musée d’Art et d’Histoire de Genève est le plus beau bâtiment « Beaux-Arts » de la ville. C’est un témoin. Son architecte Camoletti avait pour ambition de lui donner un statut urbain plus prestigieux, avec un grand jardin en terrasse qui ouvrait une large perspective. Le musée d’Art et d’Histoire abrite des collections qui témoignent d’un temps révolu… Des photographies montrent l’accord qui existait entre le contenu et le bâtiment. La cour intérieure n’est pas conçue pour être vécue, l’architecture de ses façades intérieures en témoigne, la composition n’est pas aussi maîtrisée que celle des façades principales.

 

Le musée des Beaux-Arts n’est plus adapté à ce qu’on peut attendre d’un musée aujourd’hui. Il manque d’attractivité, principalement parce qu’il a perdu ce charme proustien du temps perdu et qu’il n’a pas conquis les aménagements complémentaires qui font l’efficacité et la séduction des grands musées modernes.

 

Ce constat établi, que pouvons-nous faire ? Cinq actions :

 

  1. Montrer la beauté de l’architecture Beaux-Arts du XIXᵉ siècle. C’est un monument historique. Au plus près de sa vérité historique, conservons-le, bichonnons-le. Dans ses détails, fenêtres, portes, sols. Soyons fiers de lui !
  2. Conquérir un statut urbain en relation avec l’ambition de son créateur. Ce qui veut dire changer la relation au parc. On profitera de cette nécessité pour créer en transition avec le parc, un signe de modernité, lieu d’information, signal, vente de billets, de livres, de merchandising artistique, et aussi accès digne et simple pour les handicapés. Ce pavillon fait que le musée s’approprie le parc et le parc le musée.
  3. Cultiver le contraste entre ce premier lieu d’accueil et l’accueil dans le musée lui-même. La grande surprise sera de restituer l’esprit de l’aménagement initial dans ses meubles, son vestiaire, ses lumières, ses tentures, sa scénographie sur l’histoire… comme si le temps s’était arrêté, comme si, à la fin du XIXᵉ siècle, nous entrions dans ce lieu pimpant et neuf. Ce travail sera fait aussi dans les très belles salles de peinture avec leur éclairage zénithal. Travail sur la vérité historique, sur le décalage du temps : mais pas de nostalgie affichée, pas de patine et pas d’élevage de poussière. Refait comme au premier jour !
  4. Cultiver un deuxième contraste avec le nouveau cœur du bâtiment témoin de la culture et de l’architecture du début du nouveau siècle, acier et verre – tension et transparence – espace libéré qui découpe les façades de la cour intérieure pour leur donner plus de qualité et mieux les révéler, et qui établit un dialogue entre les XXIᵉ et le XIXᵉ siècles, accentuation de la conscience du temps passé. Les salles sont grandes et lumineuses. Un lieu de communication avec une salle de conférence bien proportionnée est situé au niveau le plus bas. Les autres niveaux, à l’exception du dernier, sont idéaux pour aménager en toute liberté des expositions temporaires. Au-dessus des toits actuels : un belvédère terrasse et un restaurant panoramique aussi « immatériel » que possible.
  5. Faire de l’émergence lumineuse de cette architecture centrale un signe mystérieux, le nouveau pôle ainsi révélé par son programme et son expression devient attracteur. Le musée des Beaux-Arts redevient un lieu du Genève moderne.

 

Cette ordonnance peut être appliquée en une ou plusieurs fois, mais pour être efficiente, les cinq traitements sont indispensables.

 

 

Jean Nouvel